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29 juin 2006

ITER* nous sauvera-t-il ?

Publié dans le ForumInfo n°18, juin 2006

Dossier Energie


La fusion, à l'inverse de la fission qui consiste à casser des "gros noyaux" (uranium, plutonium), est l'opération où deux atomes légers se rapprochent suffisamment pour en donner un plus gros : la somme des masses des produits finaux de la réaction étant plus faible que la somme des masses des produits initiaux, la différence est convertie en énergie.

Depuis les années 1930, les physiciens nucléaires ont mis en évidence et appris à déclencher la fusion. Mais pour la maintenir, il faut satisfaire des conditions très particulières : il faut réunir un très grand nombre d'atomes (la densité), les faire se cogner l'un contre l'autre avec la plus grande vitesse possible (la température) et ce, pendant le plus long temps possible (le temps de confinement). Avec ces trois paramètres a été défini un critère, le critère de Lawson, qui doit indiquer à partir de quand le système est censé fonctionner en continu.

Typiquement, il s’agit de s’approprier des conditions opératoires observées sur le Soleil ou les étoiles. Notamment domestiquer des températures de plus de 100 millions de degrés, auxquelles la matière se trouve dans son quatrième état, l’état « plasma ». Les noyaux des atomes y sont détachés de leurs électrons, optimisant ainsi le nombre de réactions produites.

Dans le soleil, dans les étoiles le confinement du plasma est assuré par les forces de gravitation. Dans notre installation "terrestre" ITER (*) comme dans les précédents modèles expérimentaux, le confinement sera assuré par de très puissants champs magnétiques.

Après cela, pour que ce phénomène présente un intérêt industriel, il faut satisfaire au moins deux conditions subsidiaires :

-        que le processus produise plus d'énergie qu'il n'en consomme !

-        que le prix de revient de l'énergie produite soit "raisonnable", externalités incluses, pour la société (contexte énergétique et environnemental) et l’époque auxquelles il s’adresse…

ITER doit permettre de continuer le travail des installations existantes sur le critère de Lawson, tout en s’attaquant à ces deux dernières questions.

À ce niveau apparaissent de nombreux "détails" propres à modérer l’enthousiasme. On nous vend que la fusion utiliserait un combustible quasi illimité qui se trouve dans l'eau de mer et elle serait propre au point de vue radioactif :

• Mais la fusion sur laquelle les efforts se concentrent est celle du Deutérium sur le Tritium, deux « cousins » atomiques de l’hydrogène. S'il est possible d'extraire le Deutérium de l'eau de mer (à quel coût énergétique ?), le Tritium, lui, radioactif de courte période (12,26 ans), se trouve en très faible quantité dans la nature. D'où la nécessité d'en fabriquer, ce qui peut se faire in situ en faisant réagir les neutrons avec le fluide caloporteur, du Lithium en l'occurrence, qui sera donc la matière première limitante du système. Notons au passage que l'installation sera donc contaminée par le Tritium, et ce radioélément, tout comme l'hydrogène dont il a les mêmes propriétés physico-chimiques, diffuse facilement à travers les métaux, avec toutes les complications que l’on éprouve déjà à tenter de stocker de l’hydrogène pour le secteur des transports.

• Et que dire des neutrons dont on espère récupérer l'énergie : ces neutrons vont activer les matériaux de structure de l’installation, générant quantités de radioéléments de période plus ou moins longue en fonction des matériaux mis au point. Sur le plan de la radioactivité, ces réacteurs, si un jour ils fonctionnent, n'auront pas forcément à envier aux réacteurs à fission : les pièces d’usure de l’enceinte réacteur devront être changées périodiquement, constituant un volume encore inconnu de déchets radioactifs de durée de vie plus ou moins longue.

En résumé, ce type de réacteur, présenté par ses promoteurs comme écologique (!), devra encore démontrer son innocuité environnementale, si sa faisabilité technique et industrielle faisait un jour évidence.

Les projets de pilote pré-industriel devant déboucher sur une commercialisation future relèvent encore de la science fiction, tant les incertitudes en termes de physique, de technologie, de tenue des matériaux, etc. sont considérables.

La fusion sera pour de très longues années encore un sujet de recherche (d'argent ?) et ne pourra être comptée parmi les sources d’énergies disponibles au niveau industriel. Il est illusoire de la faire contribuer à court et moyen terme à la maîtrise des problèmes climatiques de notre planète. Il convient plutôt de se lancer dans les économies d'énergie, ce que ne fait pas ITER, manifestement.

(*) ITER = International Thermonuclear Experimental Reactor

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